éleveur pesant un agneau carnet bio

SALAMIX

SALAMIX </br> Systèmes d’élevage ALlaitants herbagers : Adapter le type génétique et MIXer les espèces pour renforcer leur durabilité

Le projet consistait à mettre en place une expérimentation basée sur la comparaison de trois systèmes d’élevage produisant de la viande à partir de ressources herbagères (prairies permanentes en zone de montagne). Il s’agissait d’étudier l’intérêt de la mixité ovin/bovin, en comparaison à des systèmes spécialisés ovins ou bovins, en termes de production de viande finie et de qualité, de performances et de santé des animaux, de production des prairies, de travail de l’éleveur et d'impacts environnementaux. Le projet a été conduit sur le site Inra de Laqueuille (Massif central), alors en cours de conversion à l'AB.

Les prairies fournissent la base de l’alimentation des vaches et des brebis des systèmes allaitants du Massif central. Mais la finition des jeunes à l’herbe est difficile, notamment parce que les races bovines françaises sont de maturité tardive et que les agneaux sont sensibles aux parasites digestifs, ingérés au pâturage. Après le sevrage, les jeunes bovins sont exportés vers des ateliers d’engraissement, où ils sont nourris avec des rations à base d’ensilage de maïs et d’aliments concentrés. Quant aux agneaux, ils sont très souvent engraissés en bergerie avec des rations riches en concentrés. Ce verrou sur la finition des jeunes à l’herbe affecte négativement les performances environnementales des systèmes d’élevage, ainsi que la qualité nutritionnelle de la viande et l’intensité de la compétition de l’alimentation animale vs l’alimentation humaine. Il ne permet pas non plus la complète valorisation de la viande produite en agriculture biologique.

Une expérimentation à l’échelle du système d’élevage a été conçue dans l’objectif de faciliter l’engraissement des jeunes à l’herbe avec le minimum d’intrants, elle est à la base du projet SALAMIX. Elle teste, depuis 2015 et jusqu’en 2020, deux pratiques basées sur la diversité animale, qui pourraient favoriser l’engraissement des jeunes à l’herbe : le croisement entre mères de race rustique et mâles de race herbagère précoce, et l’association d’espèces (bovins et ovins). Le croisement de races apporte de la précocité (capacité de l’animal à déposer du gras intra-musculaire précocement), cette capacité étant un verrou à l’engraissement à l’herbe dans les systèmes bovins allaitants actuels. L’association d’espèces diminue le parasitisme, verrou à la finition à l’herbe chez les ovins. Cette phase de conception a abouti à la mise à l’épreuve de 3 systèmes d’élevage herbagers : un mixte associant bovins et ovins, et 2 spécialisés (l’un bovin, l’autre ovin), le croisement de races étant pratiqué dans les 3. Ces systèmes sont évalués sur les performances technicoéconomiques, la santé animale, la qualité de la viande produite, les impacts environnementaux et la charge de travail.

Pendant les 4 premières années, les agneaux du système mixte ont tous été finis exclusivement à l’herbe sans concentré (alors qu’en moyenne 10% des agneaux ont été finis en bergerie dans le système spécialisé) ; leur vitesse de croissance a été plus élevée et leur âge à l’abattage réduit. Ce résultat pourrait être lié à la dilution des parasites et à une meilleure valeur nutritive des fourrages dans le système mixte en lien avec les complémentarités dans le comportement d’ingestion des bovins et des ovins. Le système mixte n’a jamais été déficitaire en fourrages, ce qui n’est pas le cas des 2 autres systèmes. Les premiers résultats valident donc que les innovations testées permettent d’accroitre la performance du système d’élevage, mais ils mettent aussi en évidence des verrous liés à la commercialisation des produits. Les agneaux élevés à l’herbe produisent en effet une viande d’une flaveur plus forte et moins appréciée que celle des agneaux élevés en bergerie, avec par ailleurs une saisonnalité de vente marquée. Les jeunes bovins, croisés et aux carcasses de faible poids, ne correspondent pas non plus aux standards de la filière, qui privilégie les animaux de race pure, lourds et fortement développés. Un mode de commercialisation en vente directe serait plus adapté. Des analyses vont être réalisées prochainement, avec un panel de consommateurs, afin d’évaluer les qualités organoleptiques des viandes produites.

Mots-clés : système d’élevage, mixité, analyse multicritère, agriculture biologique, bovin, ovin

Ce projet est porté par Pascal D'Hour, UE des Monts d'Auvergne (UEMA, Inra Auvergne-Rhône-Alpes).  pascal.dhour @ inrae.fr

Financé dans le cadre du programme AgriBio 4, il a duré de juin 2015 à mai 2019 (fin de l’expérimentation fin 2020).

Résultat marquant #1 : Engraisser les agneaux à l’herbe

Le dispositif expérimental a été mis en place en mai 2015 sur le site de Laqueuille (1100-1500 m d’altitude) de l’UE Herbipôle du Centre Inra Auvergne Rhône Alpes. Il est prévu pour durer au moins jusque fin 2020. Il permet de mettre à l’épreuve, d’évaluer et de comparer 3 systèmes d’élevage : un système mixte (13 vaches et 66 brebis, UGB ovin/UGB bovin : 0,4), un système spécialisé bovin (22 vaches) et un système spécialisé ovin (164 brebis). Dans chaque système, les vaches de race Salers sont croisées avec des taureaux de race Angus, et les brebis de race Limousine avec des béliers de race Suffolk. Chaque système est conduit sur un parcellaire qui lui est propre, composé de 39 ha de prairies permanentes, dont 18 ha de fauche, pour 29,5 UGB, soit un chargement annuel de 0,75 UGB/ha. Parcelles et animaux ont été répartis de manière à ce que les 3 systèmes soient ‘similaires’ au début de l’expérimentation. L’ensemble du dispositif suit le cahier des charges de l’AB depuis 2015 et a été certifié en mai 2018. Les 2 systèmes spécialisés servent de ‘témoins’ auxquels est comparé le système mixte. Cette comparaison sur un pas de temps assez long permettra d’objectiver les effets de l’association d’espèces sur les services écosystémiques étudiés ; les effets de l’autre pratique (assemblage de races) seront plus difficiles à objectiver puisqu’il n’y a pas de systèmes témoins. Les agnelages se déroulent de début mars à mi-avril, l’objectif étant d’engraisser les agneaux au pâturage. Les agneaux sont conduits au pâturage sous leur mère jusqu’à fin juillet, date du sevrage. L’engraissement des agneaux se déroule sur des repousses de prairies fauchées (4 à 6 semaines de repousse). Deux avantages à cette pratique (herbe de qualité et parcelles saines du point de vue parasitaire) permettent d’engraisser les agneaux exclusivement à l’herbe. Le concentré est réservé aux brebis à des périodes clés (autour de la mise bas et lors de la lutte) en fonction de la note d’état corporel des femelles, ou aux agneaux qui doivent être finis en bergerie à la fin de la saison de pâturage. La croissance des agneaux du système mixte est significativement plus élevée que celle du système spécialisé. Les premières années d’expérimentation ont démontré qu’il était possible d’engraisser des agneaux exclusivement à l’herbe dans ces conditions, avec un avantage pour le système mixte (100 % des agneaux du système mixte contre 85 à 100% des agneaux du système spécialisé ont été finis à l’herbe). Les ventes sont cependant saisonnées. 

Résultat marquant #2

Le choix du croisement Salers x Angus permet de bénéficier de la rusticité et des qualités maternelles de la race Salers, de la bonne valorisation des fourrages et surtout de la précocité de la race Angus. L’objectif est de produire des animaux jeunes (12 à 15 mois) finis avec de l’herbe de prairies permanentes (pâturée ou récoltée). Les veaux sont conduits sous la mère et sans concentré jusqu’au sevrage à un poids de 300 kg pour un âge de 9-10 mois, les mâles sont castrés à 3 semaines. Pendant la période d’engraissement, la ration était constituée de regain et d’enrubannage avec une distribution de concentré pouvant atteindre 4 kg en fin d’engraissement (années 1
et 2) ; en 3e année, les animaux n’ont reçu aucun aliment concentré. Pour les années 1 et 2, la durée moyenne d’engraissement a été de 180 jours, le GMQ de 1015 g et le poids de la carcasse de 273 kg ; en moyenne, la 3e année, le GMQ a été de 815 g , le poids de la carcasse de 234 kg. Les premiers résultats montrent qu’il est possible d’engraisser ce type d’animal avec des régimes à base de fourrages en distribuant peu de concentré de la naissance à l’abattage, mais les carcasses sont légères. L’intérêt de la distribution de concentré pendant la phase d’engraissement peut être discuté. Dans le contexte actuel, cette production peut être valorisée en circuit court, mais elle ne satisfait pas la demande de la filière qui vise des poids de carcasses de 350 à 420 kg.

Présentation du projet

Les réalisations de SALAMIX (fiche du séminaire de bilan - novembre 2019)

Diaporama au séminaire de bilan - novembre 2019

Le projet soumis (2015)

Publications

Vazeille K., Veysset P., Note P., Sepchat B., Sallé G., D'Hour P., Prache S. (2018) Conception interdisciplinaire de systèmes d’élevage allaitant herbagers à faibles intrants : l’exemple de l’expérimentation système Salamix. Renc. Rech. Ruminants, 24. 

Publications à destination des professionnels et du public

Prache S. (2017) Fiche Exyst SALAMIX. Plaquette, réalisée dans le cadre de la mission Exyst (expérimentations Système et Sciences à l’Inra) présentée au séminaire expérimentation système le 30 et 31 mai à Poitiers. 

Dans la presse

Interview sur la biodiversité, intervention de Sophie Prache, au journal de 8h du 6 mai 2019 de France Inter. (à partir de 12’20)

Date de modification : 05 juillet 2023 | Date de création : 16 juillet 2015 | Rédaction : AV